Je n’ai jamais été très social ; ni très loquace d’ailleurs. Je ne pense pas avoir eu beaucoup d’amis, ou même beaucoup d’ennemis. Je n’aurais pas la prétention de dire que ma vie laissera une empreinte visible sur notre terre... Pour tout vous dire, j’ai mené mon existence simplement ; porté par le fil d’un fleuve dont j’ignorais le but. Je ne saurais même pas vous dire si j’eu mené une existence heureuse, ou triste. Je ne pense pas avoir vraiment connu l’amour, ou même la vie. Mais bien plus que cela ; j’ai éprouvé l’émerveillement. La joie, la colère, la déception, le désarroi, la solitude. Plus que la compagnie ou l’accomplissement. J’ai éprouvé l’émerveillement d’avoir vécu.
Je crois que les seules personnes à m’avoir connu, vraiment, furent de ma famille. Oui, sans doute. Mon père et son sens du devoir familial ! Ma famille et son histoire, son blason ! Un rôle à jouer dans notre monde... Quand je n’étais encore qu’un gosse, ces histoires me passionnaient ; et je les vivais comme un véritable devoir héroïque ! Hélas, la connerie et l’indifférence de l’âge me prirent bien tôt, et je regrette aujourd’hui de n’avoir pas prêté plus attention aux vieilles histoires que me contait mon père. Ces histoires qui me faisait rêver de folles aventures étant gamin, qui me fit donner plus de cheveux blancs à mes pauvres parents qu’ils ne le méritaient, celles aussi qui me valurent dix points de sutures quand il me prit de sauter du pommier, avec la ferme idée de m’envoler pour toujours. Ah, comme il faisait bon d’être gamin, et d’y croire. Aujourd’hui encore, j’ai honte. Honte d’avoir pu repousser toutes ces leçons comme un mendiant un peu trop collant, honte d’avoir rompu tout contact avec ma famille lorsque les idées rationnelles de notre chère société m’enfoncèrent dans le crane ces idées de sornettes, de contes pour gamin. Honte même, d’avoir prit conscience de mon erreur trop tard...
C’est sans doute la principale raison pour laquelle j’écris ces lignes aujourd’hui. Mes mémoires, le journal de bord du dernier de notre clan. Peut être par remords, par honte ? Pour apaiser l’âme de mes parents...
Sans doute.
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Moi, richard, second du nom, jure solennellement de servir et de protéger le trésor de notre royaume.
Voici la première phrase dont je me souvienne. Je me tenais alors debout, devant mon vieux père. Ses deux épais sourcils étaient froncés, il toussota ; je le connaissais ainsi nerveux. A travers les mèches poivre et sel qui découpait l’immensité de son regard en de lumineuses fenêtres, ses yeux bleu délavé m’observaient. J’y distinguais de la fierté, mais aussi une certaine peur mêlée d’appréhension. Ses longs cheveux tombaient en un torrent indiscipliné sur ses larges épaules. Paragon le sage... Ah ! L’indomptable n’était plus qu’un homme vouté dans la descendance de l’âge ; et sa voix chevrotante, autrefois si grave, témoignait des printemps qu’il terrassait autrefois avec vigueur. Pourtant, il dégageait une force de ce triomphe passé, comme le vestige d’une vie autrefois rayonnante. Il n’était pas loin d’un vieillard certes, mais fou serait celui qui se prendrait à l’insulter. Dans un froissement de soie, il me fit courber le dos, et déposa l’objet : un collier d’or sertit de rubis, dont je savais que le prix au rabais valait bien des rêves. La fraicheur de cet objet me fit couler un doux et long frisson d’impatience. Depuis neuf ans que je ne cessais d’étudier les manières, les façons, le luth, les mathématiques et la géographie de ce monde ; il n’y a pas région en ce pays dont j’ignore la moindre coutume, ni le moindre souverain. C’est enfin le jour, celui où mon existence prend un réel sens. Du moins, en partie.
Je me relevais d’un souffle, retenant mon sourire tant bien que mal : l’affreux tentait de me faire paraitre vaniteux malgré moi. Mon père se leva à son tour, et me fit signe en se retournant.
« - Mon fils, il est temps de t’initier à notre immense honneur. Mais avant tout, à notre devoir... »
Je le suivis, nous étions seul. C’est ainsi que devait se tenir l’initiation.
Mais on ne m’en voudra pas...
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Jeu 14 Jan - 23:48