"Qu'ai-je accompli jusque là ?"


Fuyumi méditait paisiblement dans le petit lac aux Naines Ufares, qui était devenu son endroit préféré pour se reposer. Elle s'y mettait, toujours au même endroit, et depuis qu'elle arrivait à contrôler (à peu près) son atmosphère glaciale, l'eau lui semblait meilleure qu'auparavant.
Elle tourna la tête vers son paquet de vêtements. De son sac dépassait un vieux parchemin usé, mais elle savait ce qu'il y avait dessus.


"Kurama..."


En fin de compte, c'était ce vieux bout de papier qui avait tout lancé. Pour une raison qui la dépassait elle-même, peut-être par envie, ou par curiosité, ou juste par ennui, elle s'était mise sur les traces de la Gardienne déchue. Elle avait appris à connaître son plus proche compagnon, il lui avait dévoilé le passé de la guerrière aux yeux d'ambre. Et elle avait trouvé cette femme admirable.
C'est peut-être ça aussi, qui l'avait poussée à agir ainsi; une femme pareille, morte d'une telle manière... Elle était contente que son assassin soit finalement en enfer, mais d'un autre côté...

Fuyumi détestait la mort. Elle déteste tout ce qui met fin à l'existence d'une personne, d'une manière ou d'une autre. Chaque être devrait avoir le droit de vivre sa vie comme il l'entend, sans que quelqu'un y interfère. Paradoxalement, ceux qui donnaient la mort aux gens méritants ne devraient pas vivre, selon elle. Évidemment, elle avait fait des exceptions: le Cercle tournait autour de la guerre, et elle-même devrait un jour donner la mort à un être humain; ce jour était inévitable, mais elle sait qu'elle ne le ferait qu'avec une bonne raison de le faire.

Le Cercle... Elle y passerait probablement le restant de sa vie... Elle se rappelait les dernières paroles de Perturabo, avant qu'il ne parte;

"Tu l'égaleras. Je crois en toi, j'en suis persuadé."


La princesse des glaces sortit doucement de l'eau, se sécha, se rhabilla. Elle saisit son sabre. Ses cheveux seuls étaient encore mouillés, ils tombaient en mèches désordonnées sur son front, ses épaules, son dos. Une flamme de courage brûlait au fond de ses yeux de saphir.
L'égaler ne serait pas de tout repos. Ne pas le décevoir serait dur.
Mais elle ferait les deux.

Elle entra doucement dans la maison, fouilla dans la petite bibliothèque et y saisit un livre à reliure bleue. Il était vierge.
Elle prit alors sa plume de Gélican, s'assit, la trempa dans l'encrier et se mit à écrire, sur la première page, en grand.